Comment le théâtre a-t-il fait en France après les guerres de Religion qui ont ensanglanté le XVIe siècle ? Comment au XVIIe siècle s’est-il emparé de la violence inscrite dans la mémoire du chaos juste passé ? Mais encore : comment la tragédie européenne moderne représente-t-elle la catastrophe et par quels effets frappants saisit-elle le public ? Qu’elle en re-joue l’événement violent dans les pièces d’actualité, ou choisisse de le figurer dans des fictions lointaines, la tragédie cherche des causes au chaos et propose des solutions politiques à une Histoire dont l’origine est le sang que ni la paix ni la concorde jouées n’effacent vraiment. Massacres, guerres civiles anglaises, premiers génocides indiens, débuts de l’esclavage : la première modernité a consacré une part importante de son théâtre à représenter ces moments d’une extrême violence. Christian Biet a défendu ce théâtre contre une histoire littéraire trop souvent oublieuse et cantonnée à la tragédie régulière classique. Il l’a édité, commenté, fait jouer et leur a consacré une part importante de ses recherches. Dans cet ouvrage crucial, il montre comment pour le public du XXIe siècle, le théâtre de la première modernité fonctionne à la manière d’un miroir sans tain où les revenants des catastrophes lointaines montrent comme en transparences notre temps de l’après-catastrophe.