Face à la pandémie de Covid 19, de nombreux chefs d'état ont eu recours à des métaphores militaires, tandis que journalistes et historiens, invités à rappeler les grandes épidémies du passé, ont régulièrement convoqué le récit de Thucydide sur la grande « peste » d'Athènes de 429 av. J.-C., en pleine guerre du Péloponnèse. Cet article a pour but de retracer l'origine de la métaphore militaire appliquée à la lutte contre la maladie et de comparer la perception des crises mortalité épidémiques et militaires dans le monde grec antique à partir des sources historiques et archéologiques. Il apparaît qu'elles étaient considérées de manières strictement opposées par les Grecs : alors que la mort d'épidémie semble privée de sens, la mort à la guerre contribue à refonder la cohésion de la cité menacée. C'est peut-être dans cette recherche d'un sens, tourné vers l'union de la communauté, que réside l'enjeu majeur de la représentation de l'épidémie en adversaire, en particulier dans les sociétés contemporaines où la guerre ne constitue plus une réalité quotidienne tangible. Mots-clés : Grèce antique-crises de mortalité-guerre-épidémie-traitement funéraire Notice biographique : Agrégée d'Histoire, docteur en Archéologie de l'Université Paris 1 et ancienne membre de l'Ecole française de Rome, R.-M. Bérard est depuis 2018 chargée de recherche au CNRS, rattachée à l'UMR 7299 Centre Camille Jullian. Ses travaux portent principalement sur les pratiques funéraires des Grecs à l'époque archaïque, en particulier en contexte colonial. Elle co-dirige depuis 2019 la mission archéologique française à Mégara Hyblaea (Sicile).